Les résultats du premier tour des élections présidentielles françaises sont un message clair et pour la France et pour l’Europe. Le nouveau Président de la République Française sera Emmanuel Macron (24,01% des suffrages exprimés) ou Marine Le Pen (21,30% des suffrages exprimés). Les deux candidats promus au deuxième tour devancent les autres candidats, François Fillon (20,01% des suffrages exprimés), Jean-Luc Mélenchon (19,58 % des suffrages exprimés), Benoît Hamon (6,36 % des suffrages exprimés) ainsi que les autres mineurs (Nicolas Dupont-Aignant, Jean Lassalle, Philippe Poutou, François Asselineau, Nathalie Artaud, Jacques Cheminade).
La victoire d’Emmanuel Macron conduit l’ancien Ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Digital (deuxième gouvernement Valls, de 2014 à 2016) en position privilégiée pour la victoire du ballotage du 7 mai prochain. Socialiste indépendant, il a su mobiliser les esprits avec l’étiquette "En Marche !", en proposant un programme original ("ni de droite ni de gauche"), dont le but est de rationaliser la gestion de l’économie nationale et de garder la position et le rôle de la France dans le contexte de l’Union Européenne. Le programme d’Emmanuel Macron, ancien élève de Sciences Po Paris et de l’École Nationale d’Administration, se situe dans le cadre d’un système capitaliste mondial qu’il faut réformer de façon avisée, sans pour autant en changer les bases et les principes d’ouverture libérale. Après le premier tour, Macron reçoit le soutien explicite de François Fillon et de Benoît Hamon et, sans doute, des électeurs de Jean-Luc Mélenchon quand la consultation intérieure aura été effectuée par ce dernier. La France, par conséquent, se retrouve devant l’option du "bloc républicain" qui se manifesta dans le passé et lors des élections présidentielles de 2002, au moment de l’affrontement entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen au deuxième tour, et lors du deuxième tour des élections régionales de 2015. Le but du "bloc républicain" est de barrer la route à tout prix au Front National.
Le succès de Marine le Pen, par ailleurs, permet au Front National d’obtenir son meilleur résultat en termes absolus. La fille de Jean-Marie Le Pen est un avocat et elle est Président du Front National depuis 2011; elle a axé sa campagne électorale sur un message central courageux: le retour au concept de souveraineté nationale comme solution pour endiguer les menaces de la période actuelle, c’est-à-dire le menaces associées au terrorisme islamique et à une gestion économique foncièrement appauvrissante et affaiblissante. Le programme de Marine Le Pen, par conséquent, s’oppose totalement à celui d’Emmanuel Macron, dans la mesure où le Front National prône un retour au contrôle direct de la politique nationale par l’État, susceptible de contrecarrer promptement l’orientation libérale et anarchiste du mondialisme actuel. Ce programme prévoit un contrôle accru des frontières, un retour à la devise nationale, la reprise en main de la conduite politique du pays en soustrayant à l’Union Européenne les prérogatives que celle-ci a absorbées pendant les dernières décennies.
Si, d’une part, le programme d’Emmanuel Macron représente la tentative de chercher des solutions réelles et plausibles sans abandonner l’architecture de la politique nationale et internationales actuelles, les propos de Marine Le Pen visent une rupture avec le système en vigueur et un inversion audacieuse de tendance, qui pourrait entraîner soit des conséquences désavantageuses inattendues soit des solutions positives.
Le déclin de la droite modérée (François Fillon) ouvre une période d’incertitude pour l’avenir. Certes, la candidature de l’ancien premier ministre a été sans doute conditionnée par l’enquête judiciaire et la mise en examen concernant l’Affaire Penelope, c’est-à-dire la rémunération de la femme de François Fillon dans le plus grand secret comme assistante parlementaire de son mari pendant les années où il était membre du Palais Bourbon. Mais l’effacement de François Fillon est l’équivalent à droite de la dérive, à gauche, du Parti Socialiste, qui n’a pas été en mesure d’exprimer un candidat gagnant. Le résultat médiocre de Benoît Hamon, en fait, est un message important pour ce qui concerne le parti de François Hollande et le relatif bon résultat de Jean-Luc Mélenchon est l’indicateur d’une aspiration aux solutions radicales à gauche.
A moment où les destins de l’Europe exigent des programmes à la hauteur des ambitions des citoyens européens, la France, pays fondateur du processus d’intégration européen, donne un signe de fragmentation et d’inquiétude, où les propositions indiquées par les candidats au deuxième tour brillent pour leur diversité et pour leurs objectifs profondément divergents.
Stefano Pilotto, Ph.D. History of International Relations, MIB School of Management in Trieste